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gissait que d’être assez fort pour faire soi-même les lois, et, dès-lors, il n’y avait de légitime et de juste que ce qui était conforme au caprice, aux désirs et aux intérêts du législateur.

Il est à remarquer que dans tous les pays, et à toutes les époques dont l’histoire nous est connue, les fauteurs du despotisme n’ont pas, manqué de s’appliquer à faire prévaloir cette doctrine, qui n’a d’autre but que de substituer l’empire de la force à l’autorité de la conscience et de la raison, en abolissant la réalité des distinctions morales, qu’on entreprend de fonder sur des conventions purement arbitraires, tandis qu’elles ont pour but la nature même de l’entendement humain. D’un autre côté, il est bien vrai qu’il n’y a rien de si facile que de se dispenser d’avoir raison, quand on est le plus fort ; mais peut-être ne remarque-t-on pas assez que la force est le résultat d’un nombre de, conditions ou d’éléments singulièrement variables, toujours prêts à se disperser, et qui ne peuvent avoir de lien durable que cette même raison dont on s’efforce de s’affranchir comme d’un joug incommode.

C’est cette importante vérité que l’on trouve démontrée dans plusieurs des ouvrages de Platon, et particulièrement dans le dialogue intitulé Gorgias, l’un des chefs-d’œuvre de cet admirable écrivain, l’un de ceux où se trouvent réunis tous les genres