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LIVRE VIII.

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ARGUMENT.

I. L’amitié (en prenant ce mot dans le sens le plus étendu) est le lien universel qui unit, ou au moins rapproche tous les êtres animés : elle est, pour l’homme, le bien le plus précieux, puisqu’elle est le principal fondement de la société. L’amitié n’est pas seulement un sentiment nécessaire à l’existence des sociétés, elle est aussi un de ceux qui embellissent et honorent le plus la vie de l’homme. Quant à l’origine ou à la cause de ce sentiment, les uns la voient dans la ressemblance des êtres entre eux, les autres dans le contraste, d’autres en cherchent l’origine jusque dans la nature inanimée ; ou ne considère ici l’amitié que relativement aux mœurs et aux passions de l’homme. — II. Il y a trois qualités ou conditions qui font naître l’amitié ; ce sont la bonté, l’agrément, et l’utilité. Il faut, pour être amis, qu’au sentiment d’une bienveillance réciproque, fondée sur l’une de ces trois qualités, se joigne la connaissance du bien qu’on se veut mutuellement. — III. Les espèces d’amitiés diffèrent, comme les motifs sur lesquels elles se fondent. L’amitié qui n’a pour cause que l’utilité ou l’agrément, ne dure ordinairement qu’autant que la cause qui l’a fait naître. Les vieillards sont plus portés à rechercher des amis utiles, et les jeunes gens des amis agréables ; mais l’amitié la plus parfaite et la plus durable est celle des hommes vertueux, parce qu’elle réunit à la fois les trois conditions qui rendent véritablement digne d’être aimé. — IV. L’amitié fondée sur l’agrément (particulièrement celle que l’on désigne par le nom d’amour) est sujette à s’éva-