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d’autres ne le sont de la certitude de leur science, comme le prouve l’exemple d’Héraclite[1]. Mais, comme le mot savoir peut s’appliquer également à celui qui a la science sans en faire usage, et à celui qui s’en sert[2], il y aura de la différence entre faire des choses qu’on ne doit pas faire, ayant la science, mais n’y pensant pas actuellement, et les faire en y pensant ; car, dans ce dernier cas, la faute semble avoir une gravité qu’elle n’a pas dans le premier. D’un autre côté, comme il y a deux sortes de propositions [les unes générales et les autres particulières], il est possible qu’en faisant usage de l’une, et non de l’autre, quoiqu’on les connaisse toutes deux, on agisse contre la science[3] ;

  1. Héraclite n’avait pas le moindre doute sur la vérité de ses systèmes, comme le remarque Aristote dans un autre endroit (M. M. l. 2, c. 6), et l’on peut dire la même chose de presque tous ceux qui font ou qui adoptent quelqu’une de ces théories plus ou moins séduisantes, à l’aide desquelles des hommes, d’ailleurs très-remarquables par l’étendue, et la variété de leurs connaissances, ont entrepris d’expliquer des choses qui seront éternellement inexplicables, et inaccessibles à des facultés aussi bornées que celles de l’homme.
  2. Platon fait la même distinction, dans le Theœtetus (p. 197). Voyez aussi M. M. l. 2, c. 6.
  3. C’est-à-dire en ne tenant compte que de la proposition générale, du syllogisme, sans avoir égard à la proposition particulière. Voici comment l’auteur lui-même développe ailleurs la même pensée (M.M. l.2, c. 6) : « Celui qui a la science peut commettre une erreur dans ce cas. Par exemple, je sais guérir la fièvre, en général, mais j’ignore si tel individu [qui est devant moi] a la fièvre. Il en sera de même au sujet de l’in-