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pas de ce que l’autre possède, par exemple, de vin ce qui donnerait lieu à l’autre de faire sortir son blé. Il faut donc qu’il s’établisse une sorte d’égalité [entre les besoins comme entre les produits]. Mais en supposant qu’aucun besoin ne se fasse sentir actuellement, l’argent est pour nous comme un garant que l’échange pourra se faire à l’avenir, si l’on est dans le cas d’y avoir recours : car il est permis à celui qui le donne, de prendre ce dont il a besoin. Au reste, l’argent lui — même est sujet ans mêmes vicissitudes [que la denrée] ; car il n’a pas toujours une égale valeur : cependant il en conserve ordinairement une plus uniforme. Voilà pourquoi il convient que toutes les choses aient un prix déterminé : car de cette manière les échanges pourront toujours avoir lieu ; et ce n’est que dans ce cas qu’il y a commerce et société.

La monnaie, étant donc comme une mesure. qui établit un rapport appréciable entre les choses, les rend égales : car il n’y aurait point de société sans échange ; point d’échange, sans égalité ; point d’égalité, sans une commune mesure. À la vérité, il est impossible de rendre commensurables des objets si entièrement différents ; mais on y réussit assez exactement pour le besoin. Il faut donc qu’il existe par supposition ou convention. Voilà pourquoi on donne [en grec] à la monnaie le nom de νόμισμα [de νόμος , usage, convention] ; c’est elle qui rend tous les objets commensurables, puisque tous peuvent être évalués en monnaie.