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avaient pu être un moment séduits par les calomnies et par les discours artificieux des ennemis de ce grand homme ; et devenus l’objet du mépris public et de l’indignation universelle, ses accusateurs périrent tous misérablement. Mais un résultat plus remarquable, une conséquence plus importante de leur injustice, et qu’ils étaient sans doute fort incapables de prévoir et de comprendre, c’est qu’elle devait, plus qu’aucun autre fait du même genre, porter jusque dans la postérité la plus reculée, avec l’horreur qu’ils inspiraient à leurs contemporains, celle des crimes pareils à celui dont ils s’étaient rendus coupables. Grâce à ce profond sentiment du beau moral, que Socrate avait su inspirer à ceux qui s’étaient attachés à lui, grâce au génie et au talent avec lequel plusieurs d’entre eux surent reproduire tous les détails de ce drame touchant et sublime, ils sont devenus familiers à la jeunesse dans tous les pays où ont pu pénétrer les admirables écrits de Platon et de Xénophon ; ils font revivre et développent dans des âmes encore pures les nobles sentiments qui animaient leurs auteurs ; les noms d’Anytus, de Mélitus et de Lycon sont devenus, en quelque sorte, ceux de tous les accusateurs qui se sont faits ou se feront les organes impurs de la vengeance ambitieuse, de l’intolérance hypocrite ; les juges prévaricateurs qui font à ces viles passions le sacrifice