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de raison qui faisait ressortir d’une manière plus vive et plus piquante le vice ou la fausseté des opinions que Socrate voulait combattre : elle consistait surtout à feindre une entière ignorance des choses qu’il savait quelquefois très-bien ; mais alors ( et c’est un des caractères les plus remarquables du procédé d’examen qui lui était familier), il n’avait pas précisément en vue d’embarrasser ou d’humilier ceux avec qui il discourait et de les faire tomber, sans qu’ils s’en doutassent, dans quelque conclusion absurde ; il semble qu’il voulait plutôt les forcer à remonter aux véritables principes de la question, à la ramener à ses vrais éléments, parce que c’était le seul moyen de l’éclaircir à leurs propres yeux, comme aux yeux de ceux qui étaient témoins de l’entretien. Au lieu de leur permettre de s’appuyer sur quelque préjugé, sur quelque opinion fausse, mais généralement admise, dont ils n’auraient pas été embarrassés de tirer les conséquences qui flattaient leurs passions ou leurs désirs, et qu’ils auraient su embellir de tous les prestiges d’une éloquence étudiée, il les obligeait, par son ignorance affectée, à une analyse exacte et sévère de ce même principe, que dès-lors il fallait bien abandonner, s’il était faux.

La haine dont Socrate était ainsi devenu l’objet se manifesta, d’une manière éclatante, dans plusieurs circonstances ; et, sans parler du monument