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pas facile de dire quelles sont les choses que l’on doit préférer à d’autres ; car il y a, entre les cas particuliers, des différences sans nombre. Que si l’on prétend que tout ce qui est agréable et beau exerce sur nous une sorte de contrainte, attendu que ce sont des objets extérieurs ; alors il faudrait dire que tout exerce sur nous un empire violent ; car c’est toujours en vue de ces choses que tous les hommes font tout ce qu’ils font : les uns par force, malgré eux, et par conséquent avec peine ; les autres avec plaisir, parce qu’ils n’envisagent que le côté agréable. Or il est ridicule d’accuser les objets extérieurs, plutôt que de s’en prendre à soi-même de la facilité qu’on a à s’en laisser séduire ; et de s’attribuer le mérite des actions estimables ou honnêtes, tandis qu’on rejette sur l’attrait des objets agréables la faute des actions honteuses. Tout acte dont le principe est extérieur, sans que celui qui agit y ait concouru en rien, paraît donc devoir être regardé comme l’effet de la violence ou de la contrainte.

Quant aux actes qui sont l’effet de l’ignorance, sans doute tous ne sont pas volontaires ; mais on peut regarder comme tels tous ceux qui sont des causes de peine et de repentir. Car celui qui a fait une action par ignorance, et qui n’en a pas de regret, ne l’a pas faite à dessein, puisqu’il n’en savait pas les conséquences, ni aussi contre son gré, puisqu’il n’en est pas affligé. Ainsi donc celui qui se repent d’une action faite par ignorance, paraît l’avoir faite malgré lui ; mais celui qui ne