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bien des institutions qui paraissent oligarchiques détruisent l’oligarchie.

§ 17. Quand on croit avoir trouvé le principe unique de vertu politique, on le pousse aveuglément à l’excès ; mais l’erreur est grossière. Ainsi dans le visage humain, le nez, tout en s’écartant de la ligne droite, qui est la plus belle, pour se rapprocher de l’aquilin et du camus, peut cependant rester encore assez beau et assez agréable ; mais si l’on poussait cette déviation à l’excès, on ôterait d’abord à cette partie la juste mesure qu’elle doit avoir, et elle perdrait enfin toute apparence de nez, par ses propres dimensions qui seraient monstrueuses, et par les dimensions beaucoup trop petites des parties voisines. Cette observation, qui pourrait s’appliquer également à toute autre partie du visage, s’applique absolument aussi à toutes les espèces de gouvernements.

§ 18. La démocratie et l’oligarchie, tout en s’éloignant de la constitution parfaite, peuvent être assez bien constituées pour se maintenir ; mais si l’on exagère le principe de l’une ou de l’autre, on en fera d’abord des gouvernements plus mauvais, et l’on finira par les réduire à n’être plus même des gouvernements. Il faut donc que le législateur et l’homme d’État sachent bien distinguer, parmi les mesures démocratiques ou oligarchiques, celles qui conservent, et celles qui ruinent la démocratie ou l’oligarchie. Aucun de ces deux gouvernements ne saurait être et subsister sans renfermer dans son sein des riches et des pauvres. Mais quand l’égalité vient à s’établir dans les fortunes, la constitution est nécessairement