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surtout, ceci est de la plus haute importance. La masse des citoyens ne s’irrite pas autant d’être exclue des emplois, exclusion qui peut être compensée pour eux par l’avantage de vaquer à leurs propres affaires, qu’elle s’indigne de penser que les magistrats volent les deniers publics ; car alors on a deux motifs de se plaindre, puisqu’on est à la fois privé et du pouvoir et du profit qu’il procure.

§ 10. Une administration honnête, quand on peut l’établir, est même le seul moyen de faire coexister dans l’État la démocratie et l’aristocratie, c’est-à-dire d’accorder aux citoyens distingués et à la foule leurs prétentions respectives. En effet, le principe populaire, c’est la faculté pour tous d’arriver aux emplois ; le principe aristocratique, c’est de ne les confier qu’aux citoyens éminents. Cette combinaison sera réalisée, si les emplois ne peuvent être lucratifs. Les pauvres alors, qui n’auraient rien à gagner, ne voudront pas du pouvoir et penseront de préférence à leurs intérêts personnels ; les riches pourront accepter le pouvoir, parce qu’ils n’ont pas besoin que la richesse publique vienne ajouter à la leur. De cette façon encore, les pauvres s’enrichiront en vaquant à leurs propres affaires, et les hautes classes ne seront point forcées d’obéir à des hommes sans consistance.

§ 11. Pour éviter du reste la dilapidation des revenus publics, qu’on fasse rendre les comptes en présence de tous les citoyens assemblés, et que des copies en soient affichées dans les phratries, les cantons et les tribus ; et pour que les magistrats soient intègres, que la loi ait