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§ 6. C’est une erreur grave, quoique fort commune, de faire reposer exclusivement la démocratie sur la souveraineté du nombre ; car, dans les oligarchies aussi, et l’on peut même dire partout, la majorité est toujours souveraine. D’un autre côté, l’oligarchie ne consiste pas davantage dans la souveraineté de la minorité. Supposons un État composé de treize cents citoyens, et parmi eux que les riches, au nombre de mille, dépouillent de tout pouvoir politique les trois cents autres, qui, quoique pauvres, sont libres cependant aussi bien qu’eux, et leurs égaux à tous autres égards que la richesse ; dans cette hypothèse, pourra-t-on dire que l’État est démocratique ? Et de même, si les pauvres en minorité sont politiquement au-dessus des riches, bien que ces derniers soient plus nombreux, on ne pourra pas dire davantage que c’est là une oligarchie, si les autres citoyens, les riches, sont écartés du gouvernement.

§ 7. Certes il est bien plus exact de dire qu’il y a démocratie là où la souveraineté est attribuée à tous les hommes libres, oligarchie là où elle appartient exclusivement aux riches. La majorité des pauvres, la minorité des riches, ne sont que des circonstances secondaires. Mais la majorité est libre, et c’est la minorité qui est riche. Il y aurait sans doute autant d’oligarchie à répartir le pouvoir selon la taille et la beauté, comme on le fait, dit-on, en Éthiopie ; car la beauté et l’élévation de la taille sont des avantages bien peu communs.

§ 8. On n’en aurait pas moins