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Il nous reste à rechercher si l’éducation de la raison doit précéder celle des habitudes ; car il faut que ces deux dernières influences soient dans la plus parfaite harmonie, puisque la raison même peut s’égarer en poursuivant le meilleur but, et que les mœurs ne sont pas sujettes à moins d’erreurs.

§ 22. Ici, comme dans tout le reste, c’est la génération par laquelle tout commence ; mais la fin delà génération remonte à une source dont l’objet est tout différent. Dans l’homme, la vraie fin de la nature c’est la raison et l’intelligence, seuls objets qu’on doit avoir en vue dans les soins appliqués, soit à la génération des citoyens, soit à la formation de leurs mœurs.

§ 23. De même que l’âme et le corps, avons-nous dit, sont bien distincts, de même l’âme a deux parties non moins différentes : l’une irrationnelle, l’autre douée de raison ; elles se produisent sous deux manières d’être diverses : pour la première, l’instinct ; pour l’autre, l’intelligence. Si la naissance du corps précède celle de l’âme, la formation de la partie irrationnelle est antérieure à. celle de la partie raisonnable. Il est bien facile de s’en convaincre : la colère, la volonté, le désir se manifestent chez les enfants aussitôt après leur naissance ; le raisonnement, l’intelligence ne se montrent, dans l’ordre naturel des choses, que beaucoup plus tard. Il faut donc nécessairement s’occuper du corps avant de penser à l’âme ; et après le corps, il faut songer à l’instinct, bien qu’en définitive l’on ne forme l’instinct que pour l’intelligence, et que l’on ne forme le corps qu’en vue de l’âme.