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mais y atteindre est permis aux uns et interdit aux autres ; et c’est un effet, , soit des circonstances, soit de la nature. La vertu ne s’obtient qu’à certaines conditions, faciles à réunir pour les individus heureusement placés, plus difficiles pour les individus moins favorisés ; et l’on peut, même avec toutes les facultés requises, s’égarer dans la route dès les premiers pas. Puisque nos recherches ont pour objet la meilleure constitution, source de l’administration parfaite de l’État, et que cette administration parfaite est celle qui assurera la plus grande somme de bonheur à tous les citoyens, il nous faut nécessairement savoir en quoi consiste le bonheur.

§ 3. Nous l’avons dit dans notre Morale, si toutefois il nous est permis de croire que cet ouvrage n’est pas dénué de toute utilité : le bonheur est un développement et une application complète de la vertu, non pas relative, mais absolue. J’entends par relative, la vertu appliquée aux besoins nécessaires de la vie ; par absolue, celle qui s’applique uniquement au beau et au bien. Ainsi, en fait de justice humaine, la punition et le juste châtiment du coupable sont des actes de vertu ; mais c’est aussi un acte de nécessité, c’est-à-dire qu’il n’est bon que parce qu’il est nécessaire ; pourtant il serait certainement préférable que les individus et l’État pussent se passer de pénalité. Les actes, au contraire, qui n’ont pour objet que la gloire et le perfectionnement moral, sont beaux dans le sens absolu. De ces deux ordres d’actes, le premier tend simplement à nous délivrer d’un mal ; le second,