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bien d’autres usages du même genre, établis par les lois ou sanctionnés par les mœurs.

§ 7. Il suffit de quelques instants de réflexion pour trouver bien étrange qu’un homme d’État puisse jamais méditer la conquête et la domination des peuples voisins, qu’ils consentent ou non à supporter le joug. Comment l’homme politique, le législateur, devraient-ils s’occuper d’un but qui n’est pas même légitime ? C’est renverser toutes les lois que de rechercher la puissance par tous les moyens, non pas seulement de justice mais d’iniquité ; car le triomphe même peut n’être pas juste.

§ 8. Les sciences autres que la politique ne nous offrent rien de pareil. Le médecin et le pilote ne songent ni à persuader ni à contraindre, celui-là les malades qu’il soigne, celui-ci les passagers qu’il conduit. Mais on dirait que l’on confond généralement le pouvoir politique et le pouvoir despotique du maître ; et ce qu’on ne trouve ni équitable ni bon pour soi-même, on ne rougit pas de chercher à l’appliquer à autrui ; pour soi, l’on réclame hautement la justice ; on l’oublie complètement à l’égard des autres.

§ 9. Tout despotisme est illégitime, excepté quand le maître et le sujet le sont l’un et l’autre de droit naturel ; et si ce principe est vrai, il ne faut vouloir régner en maître que sur les êtres destinés au joug d’un maître, et non pas sur tous indistinctement ; de même que pour un festin ou un sacrifice, on va non pas à la chasse des hommes, mais à celle des animaux qu’on peut chasser dans cette vue, c’est-à-dire, des animaux