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qui venait lui demander conseil, il se contenta de niveler une certaine quantité d’épis, en cassant ceux qui dépassaient les autres. Le messager ne comprit rien au motif de cette action ; mais Thrasybule, quand on l’en informa, entendit fort bien qu’il devait se défaire des citoyens puissants.

§ 4. Cet expédient n’est pas utile seulement aux tyrans ; aussi ne sont-ils pas les seuls a en user. On l’emploie avec un égal succès dans les oligarchies et dans les démocraties. L’ostracisme y produit a peu près les mêmes résultats, en arrêtant par l’exil la puissance des personnages qu’il frappe. Quand on est en mesure de le pouvoir, on applique ce principe politique à des États, à des peuples entiers. On peut voir la conduite des Athéniens à l’égard des Samiens, des Chiotes et des Lesbiens. A peine leur puissance fut-elle affermie, qu’ils eurent soin d’affaiblir leurs sujets, en dépit de tous les traités ; et le roi des Perses a plus d’une fois châtié les Mèdes, les Babyloniens et d’autres peuples, tout fiers encore des souvenirs de leur antique domination.

§ 5. Cette question intéresse tous les gouvernements sans exception, même les bons. Les gouvernements corrompus emploient ces moyens-là dans un intérêt tout particulier ; mais on ne les emploie pas moins dans les gouvernements d’intérêt général. On peut éclaircir ce raisonnement par une comparaison emprunté