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sorte que la pauvreté ne puisse jamais porter atteinte à leur considération, soit comme magistrats, soit comme simples particuliers. Mais si l’on doit avouer que la fortune mérite attention, à cause du loisir qu’elle procure, il n’en est pas moins dangereux de rendre vénales les fonctions les plus élevées, comme celle de roi et de général. Une loi de ce genre rend l’argent plus honorable que le mérite, et inspire l’amour de l’or à la république entière. § 7. L’opinion des premiers de l’Etat fait règle pour les autres citoyens, toujours prêts à les suivre. Or, partout où le mérite n’est pas plus estimé que tout le reste, il ne peut exister de constitution aristocratique vraiment solide. Il est tout naturel que ceux qui ont acheté leurs charges s’habituent à s’indemniser par elles, quand, à force d’argent, ils ont atteint le pouvoir ; l’absurde est de supposer que, si un homme pauvre, mais honnête, peut vouloir s’enrichir, un homme dépravé, qui a chèrement payé son emploi, ne le voudra pas. Les fonctions publiques doivent être confiées aux plus capables ; mais le législateur, s’il a négligé d’assurer une fortune aux citoyens distingués, pourrait au moins garantir l’aisance aux magistrats. § 8. On peut blâmer encore le cumul des emplois, qui passe à Carthage pour un grand honneur. Un homme ne peut bien accomplir qu’une seule chose à la fois. C’est le devoir du législateur d’établir cette division des emplois, et de ne pas exiger d’un même individu qu’il fasse de la musique et des souliers. Quand l’Etat n’est pas trop restreint, il est plus conforme au principe républicain et démocratique d’ouvrir