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XII PRÉFACE.

morale ne doit emprunter absolument rien à l'expé- rience de la vie. La pratique qu'elle doit régler ne peut pas lui fournir les solides matériaux dont elle a besoin pour son édifice ; et, si elle admettait un seul élément empirique, elle courrait le danger de ne faire qu'une construction ruineuse. On le comprend sans peine. Comme une action n'est moralement bonne que par l'intention qui l'inspire, indépendam- ment du résultat qu'elle peut avoiri et comme les intentions sont invisibles à nos faibles yeux, attendu que Dieu s'est réservé le secret des cœurs, il serait impossible de prouver absolument qu'aucune action observée sur la scène du monde, et parmi les hommes, soit réellement bonne. Kant a bien l'air de porter le doute plus loin, et de soupçonner qu'il n'y a jamais eu d'action vraiment bonne, dans toute l'extension de ce mot. Mais c'est un scepticisme exagéré et par trop misanlhropique. Il faut se borner à dire qu'en admettant que de telles actions existent dans toute la pureté désirable, il serait hors de notre pouvoir de le démontrer. Tout eu croyant au témoignage de nos semblables, nous ne pouvons être dans leur conscience; et il n'est pas impossible qu'une action qui a toutes les apparences de la vertu, soit profon- dément perverse par les motifs qui l'ont dictée,

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