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PRÉFACE. Ml

do vices, dont les sociétés lui présciUeul le déplo- rable spectacle, elle doute de son utilité et de sa puissance. Elle se dit que la foule ne l'écoute et ne la suit pas plus aujourd'hui qu'au temps du philo- sophe grec. A l'exemple d'Aristote , elle serait presque tentée de se taire, sous prétexte que sa voix est méconnue, et que, dans ce tumulte de passions, d'intérêts, de vices et de crimes, elle ne peut faire entendre ses conseils, tout salutaires qu'ils sont. Mais il semble au contraire que ce devrait être un motif encore plus impérieux de prendre la parole. Plus une société est corrompue et plus la foule est ignorante et vicieuse, plus il faudrait essayer de les guérir, si c'était là le but véritable de la science morale. Mais la philosophie, sans entrer dans cette route, où l'attendent tant de mécomptes et de diffi- cultés insurmontables, doit se dire que, si elle ne peut songer à réformer les siècles, elle peut toujours sauver son propre honneur. 11 est bon au milieu de la défaillance universelle qu'elle conserve son cou- rage et sa foi inébranlable. Il y aura bien toujours dans cette corruption générale quelques âmes pour la comprendre et garder son saint dépôt. Cela suffit ; et le philosophe, quand n)ème il devrait rester dans son isolement, aurait encore pour se soutenir, celle

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