Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/169

Cette page n’a pas encore été corrigée

PUKFACE. ri.\i

» iTsterail que la bonne volonté tonle seule, elle biil- •' lerait encore de son propre éclat comme une pierre >' précieuse ; car elle lire d'elle-même toute sa va- > leur, » Cependant, tout en trouvantque celte idée de la valeur absolue de la simple volonté, indépendam- ment de toute utilité, est conforme à l'opinion com- mune, Kant y voit quelque chose de si étrange qu'il se sent conduit à la justifier; et l'explication qu'il en donne est des plus ingénieuses et des plus vraies.

Si la nature, en créant un être raisonnable, n'avait eu pour but que le bonheur de cet être, elle aurait bien mal pris ses mesures en confiant ce soin à la raison. En effet, toutes les actions que la créature doit faire pour arriver à ce but, l'instinct les lui révélerait avec bien plus d'exactitude; et le but serait bien plus sûrement rempli. La nature aurait empêché que la raison ne servît à un usage pratique, et n'eût la présomption dedécouvrir, avec sa faible vue, tout le système du bonheur et des moyens d'y parvenir. Elle ne nous aurait pas seulement enlevé le choix des fins, mais aussi le choix des moyens; et elle aurait sagement confié l'un et l'autre à l'instinct, qui eût été infaillible. Si donc la raison ne nous a pas été donnée pour nous assurer le bonheur, qu'elle manque si souvent, et si néanmoins elle doit, comme faculté

�� �