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faire, par la science, des choses dont il n’y a pas de science ; et ainsi, bien que ce soit la même science qui traite de la santé et de la maladie, ce n’est pas de la même façon qu’elle en traite ; puisque l’une est suivant la nature, et que l’autre est contre nature. § 27[1]. C’est tout à fait de même, que la volonté, dans l’ordre de la nature, s’applique toujours au bien, et que c’est quand elle est contre nature qu’elle peut s’appliquer aussi au mal. Par nature, elle veut le Bien, et elle ne veut le mal que contre nature et par perversité. Mais la ruine et la perversion de chaque chose ne la fait point passer au hasard à un nouvel état quelconque. Les choses ne vont alors qu’à leurs contraires et aux degrés intermédiaires ; car il n’est pas possible de sortir de ces limites ; et l’erreur elle-même ne se produit pas indifféremment dans des choses prises à tout hasard. L’erreur ne se produit que dans les contraires, pour tous les cas où il y a des contraires ; et même parmi les contraires, l’erreur n’a lieu que dans les contraires qui le soit suivant la science qu’on en a.

§ 28[2]. Il y a donc une sorte de nécessité que l’erreur et l’intention ou préférence réfléchie passent du milieu aux divers contraires. Or, le plus et le moins sont les contraires du milieu ou moyen terme. La cause de l’erreur, c’est le plaisir ou la peine que nous ressentons ; car nous

  1. La volonté… s’applique toujours au bien. Noble et juste idée des dons que Dieu a faits à l’âme humaine. Ce sont là du reste exactement les principes soutenus par Aristote dans la Morale à Nicomaque, et notamment livre III, ch. 5.
  2. Passent du milieu. Où est la vérité et la sagesse. — De l’une et de l’autre. C’est-à-dire, de l’erreur et de la préférence.