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jamais la faim. § 7[1]. Ces diversités viennent de ce que la nature n’est pas en toutes choses également éloignée du milieu, et de ce que tantôt nous aimons moins le travail, et que tantôt nous aimons davantage le plaisir. § 8[2]. Il en est de même aussi pour l’âme. Nous regardons comme contraire au juste milieu l’habitude ou la disposition qui nous fait faire en général le plus de fautes, et qui est la plus ordinaire ; quant à l’autre, elle reste ignorée de nous, comme si elle n’existait pas ; et elle passe inaperçue, à cause de sa faiblesse qui nous empêche de la sentir. § 9[3]. Ainsi, la colère nous paraît le vrai contraire de la douceur ; et l’homme colérique, le contraire de l’homme doux. Et cependant, il peut y avoir excès à être trop accessible à la pitié, à se réconcilier trop facilement, et à ne pas même s’emporter quand on vous soufflette. Il est vrai que ces caractères-là sont fort rares, et qu’en général on penche plutôt vers l’excès opposé, l’emportement n’étant guère disposé à se faire le flatteur de personne.

§ 10[4]. En résumé, nous avons fait le catalogue des manières d’être morales suivant chaque passion, avec leurs excès et leurs défauts, et des manières d’être contraires, qui placent l’homme dans le chemin de la droite raison ;

  1. Tantôt nous aimons le travail. Autre pensée, qui n’est pas suffisamment exprimée.
  2. Il en est de même aussi pour l’âme. Les exemples qui précèdent n’ont pas éclairci cette réflexion sur l’âme ; loin de là ; l’observation psychologique est certainement ici plus claire que les comparaisons par lesquelles l’auteur prétend la préparer.
  3. Il peut y avoir excès. Et c’est précisément cet excès qui est le contraire de la colère. Seulement, comme il est assez rare, on ne le remarque pas et l’on s’arrête à la douceur, qui est beaucoup plus fréquente et beaucoup plus connue.
  4. De voir plus tard. Il serait difficile de citer l’endroit de la Morale à Eudème auquel ceci se rapporte ; et la discussion promise ici n’est point ramenée par la suite des Idées. C’est peut-être un simple oubli de l’auteur ; et ces omissions sont assez naturelles pour qu’on ne s’étonne point de celle-ci. Peut-être aussi faut-il rapporter ce passage au VIe livre, ch. 4, § 3 de la Morale à Nicomaque, qui est comme on sait le livre V de la Morale à Eudème. Voir la Dissertation préliminaire.