Page:Aristote - La Morale d’Aristote, Ladrange, 1856.djvu/1183

Cette page n’a pas encore été corrigée

mais l'ami s'est mal conduit, et l'on s'emporte contre lui. Sa conduite cependant n'est pas aussi déraisonnable qu'on la suppose ; ce n'était pas par vertu que vous vous étiez lié avec lui; rien d'étonnant dès lors qu'il fasse des choses qui ne sont pas conformes à la vertu. L'indignation qu'on ressent n'est donc pas justifiée; et tout en ne contractant au fond qu'une amitié de plaisir, on s'imagine bien à tort qu'on devrait avoir l'amitié de vertu. C'est tout simplement impossible ; car l'amitié du plaisir ou de l'intérêt s'inquiète assez peu de la vertu. On s'est lié par plaisir, et l'on cherche la vertu ; on se trompe.

§ 25. La vertu ne suit ni le plaisir ni l'intérêt, tandis que l'un et l'autre suivent la vertu. On est dans une grave erreur si l'on ne croit pas que les gens de bien se soient mutuellement très agréables. Les méchants, comme le dit Euripide, se plaisent bien les uns aux autres :

« Et le méchant toujours recherche le méchant, »

Mais encore une fois, la vertu ne suit pas le plaisir ; c'est le plaisir au contraire qui suit la vertu.

§ 26. Le plaisir est-il, ou n'est-il pas un élément nécessaire, outre la vertu, dans l'amitié des gens de bien ? Ce serait une absurdité de prétendre qu'il ne faut pas qu'il y ait du plaisir dans ces liaisons . Si vous Ôtez aux gens de bien cet avantage de se plaire et d'être agréables les uns