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L’ostracisme.
Athènes avant Salamine.

XXII. À la suite de ces changements, la constitution devint bien plus favorable au peuple que n’était celle de Solon. Il était arrivé en effet que la tyrannie avait fait tomber en désuétude les lois de Solon et que Clisthène en établit de nouvelles pour gagner la foule. Entre autres fut alors établie la loi sur l’ostracisme[1].  Tout d’abord, la cinquième année après cette réforme, sous l’archontat 501/0 d’Hermocréon, on fit pour le Conseil des Cinq Cents la formule du serment que l’on prête encore maintenant. Puis on élut les stratèges[2] par tribu, un de chaque tribu (le polémarque était le chef de toute l’armée).  Quand, onze ans 490/89 après, les Athéniens eurent remporté la victoire de Marathon sous l’archontat de Phainippos, ils laissèrent passer deux ans 488/7 après la victoire et, comme le peuple prenait plus d’audace, alors pour la première fois on appliqua la loi sur l’ostracisme, que l’on avait établie par défiance des gens puissants, parce que Pisistrate était chef du parti populaire et stratège quand il devint tyran.  Le premier qui fut frappé de l’ostracisme parmi ses parents fut Hipparchos[3], fils de Charmos, du dème de Collytos ; c’est d’ailleurs pour lui surtout que Clisthène avait établi la loi, parce qu’il voulait le chasser d’Athènes. En effet les Athéniens, usant en cela de l’humanité habituelle à la démocratie, laissaient habiter dans le pays les amis des tyrans qui ne s’étaient pas compromis dans les troubles ; et leur guide et leur chef était Hipparchos.  L’année qui suivit immédiatement, sous l’archontat de 487/6 Télésinos, on tira au sort par tribu les neuf archontes parmi les cinq cents candidats désignés par les électeurs des dèmes, alors pour la première fois après la tyrannie (les précédents étaient tous élus), et l’on frappa d’ostracisme Mégaclès, fils d’Hippocratès, du dème d’Alopéké.  Donc pendant trois ans on frappa d’ostracisme les amis des tyrans, en vue de qui la loi avait été établie ;

  1. Cf. Philochore fr. 79 b ; J. Carcopino, Histoire de l’ostracisme athénien (Bibl. de la fac. des lettres de Paris, XXV, 1909).
  2. Sur les stratèges et leurs fonctions au ive s., cf. chap. LXI.
  3. Hipparchos, archonte en 496/5, fut frappé de l’ostracisme en 488/7. S’il y eut des ostracisés plus anciens, ils rentrèrent régulièrement avant le décret d’amnistie qui a fourni à Aristote les noms cités ici.