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CONSTITUTION D’ATHÈNES

aucune prérogative ; et même un jour, cité pour meurtre devant l’Aréopage, il se présenta en personne pour se défendre, mais celui qui l’avait cité, pris de peur, fit défaut.  Aussi resta-t-il longtemps au pouvoir et, quand il était chassé, il revenait facilement. En effet la majorité des nobles et des démocrates lui était favorable ; car il se conciliait les uns par son commerce et les autres en les aidant dans leurs affaires, et il était bien doué pour plaire aux deux partis. 10  D’ailleurs les lois des Athéniens sur les tyrans étaient douces à cette époque, en particulier celle qui se rapporte le plus exactement à l’établissement de la tyrannie. La voici : « Ceci est la coutume des Athéniens établie aussi par les ancêtres : si quelqu’un se révolte pour devenir tyran ou aide à établir la tyrannie, il sera privé de tout droit[1], lui et sa famille. »


Les Pisistratides.

XVII. Donc Pisistrate vieillit au pouvoir et mourut de maladie sous l’archontat de 528/7 Philonéos, trente-trois ans après sa première accession à la tyrannie, et après être resté pendant cette période dix-neuf ans au pouvoir ; en effet il passa le reste en exil.  C’est pourquoi déraisonnent manifestement ceux qui prétendent que Pisistrate a été aimé par Solon et qu’il a commandé dans la guerre entreprise contre les Mégariens au sujet de Salamine[2] : leur âge rend cela impossible, si l’on veut bien calculer la durée de la vie de chacun et sous quel archonte il est mort.  Après la mort de Pisistrate, ses fils gardèrent le pouvoir et gouvernèrent de même. Deux étaient fils de sa femme légitime : Hippias et Hipparque, et deux fils de l’Argienne : Iophon et Hégésistratos surnommé Thettalos[3].  En effet Pisistrate avait épousé à Argos la fille d’un Argien nommé Gorgilos, Timonassa, qui avait auparavant été femme

  1. Cf. VIII 5. Aristote, suivant le langage de son temps, interprète ἄτιμος par privé des droits de citoyen ; mais au vie siècle l’expression désignait la mise hors la loi.
  2. Cf. Plutarque, Solon XII 3. C’est à l’occasion de cette guerre que Solon aurait composé une élégie dont Plutarque (ibid. VIII) nous a conservé le début.
  3. Cf. Thucydide VI 55, 1 et Hérodote V 94, qui nous apprend qu’Hégésistratos fut tyran de Sigée. Hippias s’établit aussi dans cette région après son expulsion d’Athènes.