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CONSTITUTION D’ATHÈNES

Rhaikélos ; de là il gagna la région du Pangée[1] où il rassembla de l’argent et des troupes. Arrivé à Érétrie dans le cours de la onzième année, ce fut alors qu’il tenta pour la première fois de recouvrer par force son pouvoir, avec l’aide de beaucoup de gens, surtout des Thébains et de Lygdamis de Naxos, et aussi des cavaliers qui gouvernaient Érétrie.  Après la victoire remportée près du temple d’Athéna Pallénis[2], la prise d’Athènes et le désarmement du peuple, la tyrannie lui fut désormais assurée. Il s’empara de Naxos et en donna le gouvernement à Lygdamis[3].  Voici comment il désarma le peuple[4] ; il fit une revue dans le Théseion et se mit à discourir ; il [discourut] pendant quelque temps et, comme le peuple prétendait ne pas l’entendre, il lui dit de monter à l’entrée de l’Acropole afin que sa voix portât mieux. Pendant qu’il passait le temps à parler au peuple, ceux qui en avaient reçu l’ordre enlevèrent les armes et les renfermèrent dans les bâtiments du Théseion qui étaient tout proches ; puis ils vinrent le signaler à Pisistrate.  Celui-ci, quand il eut fini son discours, raconta ce qui s’était passé pour les armes et dit qu’il ne fallait ni s’en étonner ni s’en affliger, que chacun devait retourner chez soi et s’occuper de ses affaires personnelles, et que lui-même aurait la charge de toutes celles de l’État.


Le régime de Pisistrate.

XVI. Voilà donc comment s’établit dès le début la tyrannie de Pisistrate et quelles furent ses vicissitudes.  Pisistrate gouvernait la ville, comme je l’ai déjà dit[5], avec modération et plutôt en bon citoyen qu’en tyran. En général il était humain, doux et indulgent pour les délinquants, et en particulier il avançait de l’argent aux pauvres pour leurs travaux, si bien qu’ils gagnaient leur vie en cultivant la terre.  Il

  1. Région montagneuse aux confins de la Thrace et de la Macédoine, où se trouvaient des mines d’or et où, au ive s., fut fondée la ville de Philippes.
  2. Entre Marathon et Athènes.
  3. Cf. Hérodote I 64 et Athénée VIII 348 A-C (qui cite, précisément à ce propos, la Constitution des Naxiens d’Aristote).
  4. Cf. Polyen, Stratagèmes L 21, 2.
  5. Cf. XIV 3.