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CONSTITUTION D’ATHÈNES

autres : plus sage que ceux qui ne voyaient pas que Pisistrate aspirait à la tyrannie, plus courageux que ceux qui le savaient et se taisaient. Comme ses paroles ne persuadaient pas le peuple, il suspendit ses armes devant sa porte et dit que pour sa part il avait secouru sa patrie autant qu’il le pouvait (il était déjà très âgé) et qu’il invitait les autres à agir de même.  Solon n’aboutit à rien avec ses exhortations, et Pisistrate, ayant pris le pouvoir, gouverna plutôt en bon citoyen qu’en tyran. Alors que sa puissance n’était pas encore affermie, le parti de Mégaclès et celui de Lycourgos se coalisèrent et le chassèrent, la sixième année après sa première arrivée au pouvoir, sous l’archontat d’Hégésias[1].  Onze ans après, Mégaclès, évincé par les partis en lutte, négocia avec Pisistrate sous la condition que ce dernier épouserait sa fille ; et il le ramena d’une façon bien antique et bien simple[2]. Il répandit le bruit qu’Athèna ramenait Pisistrate, alla chercher une grande et belle femme, originaire du bourg de Paiania selon Hérodote[3], bouquetière thrace habitant Kollytos et du nom de Phyé selon d’autres ; il la costuma en déesse et la fit entrer dans Athènes avec Pisistrate ; celui-ci s’avançait sur un char avec la femme à ses côtés et les habitants le reçurent avec des marques d’adoration et d’étonnement.


Établissement de Pisistrate au pouvoir.

XV. C’est donc ainsi qu’eut lieu le premier retour de Pisistrate. Puis il fut chassé exactement six ans après son retour ; car il ne se maintint pas longtemps : comme il ne voulait pas vivre avec la fille de Mégaclès, il s’enfuit par crainte des deux partis[4].  Tout d’abord il colonisa près du golfe Thermaïque un lieu[5] appelé

  1. Sur les difficultés de cette chronologie, voir l’Introduction, p. xi-xii. En tout cas les dates de l’avènement (561/0) et de la mort de Pisistrate (527) paraissent sûres.
  2. Cf. Hérodote I 60 ; Cleidémos, fr. 24 (Fragm. hist. graec., I, p. 364).
  3. Hérodote est le seul auteur dont le nom soit cité par Aristote ; même une affirmation de Thucydide est désignée par ὁ λεγόμενος λόγος (XVIII 4).
  4. Cf. Hérodote I 61-64.
  5. À l’extrémité S. du promontoire O. de la Chalcidique.