Page:Aristote - Constitution d’Athènes, trad. Haussoullier et Mathieu, 1922.djvu/19

Cette page a été validée par deux contributeurs.
ix
INTRODUCTION

nouveau les lois de Dracon sur le meurtre, introduite dans un ouvrage à la fois historique et politique par l’oligarque qui a transmis à Aristote les prétendues constitutions de 411, et acceptée par ce dernier en même temps qu’elles parce qu’elle aussi pastichait les documents officiels. Telles sont donc les erreurs même d’Aristote qui témoignent pour nous de son amour de la documentation précise au détriment de la tradition authentique.

Enfin, où les textes officiels lui font défaut, Aristote recherche et interprète les institutions subsistantes qui sont les indices (τεκμήρια) ou les preuves (σημεῖα) du passé (cf. chap. iii ; vii 4 ; viii 1 ; xiii 5) ; certes parfois il se trompe dans cette interprétation ou se laisse égarer par l’influence d’une de ses sources ; du moins Aristote a-t-il tenté ainsi d’inaugurer une recherche vraiment scientifique de l’évolution politique d’Athènes.

Les sources d’Aristote sont donc diverses et souvent opposées ; voyons comment il les utilise. Il se rend compte de leur désaccord et cherche à donner à son lecteur la version qui lui paraît la mieux établie ; rares cependant sont au début les moments où une version s’impose à lui au point de faire disparaître les autres. En certains cas il expose les versions opposées sans se décider entre elles ; mais ce cas est encore assez rare (par ex. chap. xiv 4 ; xvii 4). D’autres fois il nous indique la version qu’il juge la plus autorisée ou la plus vraisemblable (πιθανώτερος vi 3 ; εὐλογώτερον vii 4 ; δοκεῖ τοῖς μὴ παρέργως ἀποφαινομένοις xxviii 5). Mais dans la plupart des cas il adopte une méthode de conciliation entre les diverses versions. C’est qu’utilisant des pamphlets politiques, il a senti leur partialité et s’est défié d’eux ; il a vu que chacun d’eux cherchait à exploiter l’histoire d’Athènes pour la plus grande gloire de son parti et, influencé peut-être par sa doctrine du « juste milieu », il a cru voir en cha-