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populaire et ne détruisît leur pouvoir absolu ; ils dressèrent alors une liste de trois mille citoyens qui devaient, disaient-ils, participer au gouvernement.  Théramène à nouveau critiqua ces mesures, d’abord parce que, voulant appeler au pouvoir les honnêtes gens, ils n’appelaient que trois mille personnes, comme si le mérite était limité à ce nombre ; puis parce qu’ils faisaient deux choses contradictoires en établissant un pouvoir fondé sur la violence et plus faible que ses sujets[1]. Les Trente ne tinrent pas compte de ces critiques et pendant longtemps ils remirent la publication de la liste des Trois Mille et la gardèrent entre leurs mains ; et quand ils décidaient de la publier, ils effaçaient certains des inscrits et inscrivaient d’autres gens à leur place.


Exécution de Théramène.

XXXVII. L’hiver déjà commencé, comme Thrasybule et les bannis s’étaient emparés de Phylé[2], les Trente qui avaient échoué dans l’expédition faite contre eux décidèrent de désarmer les autres citoyens et de perdre Théramène de la manière suivante. Ils présentèrent deux lois au Conseil[3], en lui ordonnant de les accepter à mains levées : l’une donnait pleins pouvoirs aux Trente pour mettre à mort les citoyens qui n’étaient pas sur la liste des Trois Mille, l’autre interdisait l’exercice des droits politiques à tous ceux qui avaient détruit les fortifications d’Éétioneia[4] ou avaient agi contre les Quatre Cents qui avaient établi la précédente oligarchie ; or Théramène avait participé à ces deux actions et ainsi, une fois les lois ratifiées, il était exclu de la cité et les Trente étaient libres de le mettre à mort.  Après l’exécution de Théramène, les Trente désarmèrent tous les Athéniens à l’exception des Trois Mille, et en tout ils inclinèrent de plus en plus vers la cruauté et la

  1. Cf. Xénophon, Helléniques II 3, 19.
  2. Fort commandant la route de Béotie à Athènes à travers la chaîne du Parnès.
  3. Cf. Xénophon, Helléniques, II 3, 11-50. Critias, chef de la fraction des Trente opposée à Théramène, n’est pas nommé par Aristote.
  4. Ouvrage fortifié protégeant au N. l’entrée du port du Pirée, détruit en 411 par les adversaires des Quatre Cents de crainte que ceux-ci n’y accueillent la flotte péloponnésienne. Cf. Thucydide VIII 90 et 92.