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clès, le chef des gens en vue fut Nicias, celui qui périt en Sicile ; celui du parti démocratique fut Cléon, fils de Cléainétos, qui paraît avoir le plus corrompu le peuple par ses emportements et qui le premier cria à la tribune, y employa les injures et parla tout en se débraillant, alors que les autres orateurs gardaient une attitude correcte. Après eux le chef de l’opposition fut Théramène, fils d’Hagnon ; celui du parti démocratique, Cléophon, le fabricant de lyres, qui fut le premier à donner la diobélie[1] ; il la distribua pendant quelque temps, puis Callicratès de Paiania le renversa en promettant le premier d’ajouter une obole aux deux autres. D’ailleurs on les condamna plus tard tous deux à mort ; car la foule, même si elle s’est laissé tromper, a l’habitude de détester ensuite ceux qui l’ont incitée à faire quelque chose de mal.  À partir de Cléophon, ceux qui ont obtenu la direction du parti populaire ont été sans interruption ceux qui voulaient le plus montrer de l’audace et de la complaisance pour la foule en ne regardant que le moment présent.  Ceux qui, après les anciens, semblent avoir été les meilleurs hommes politiques à Athènes, sont Nicias, Thucydide et Théramène. Sur Nicias et Thucydide, presque tous sont d’accord pour dire qu’ils ont été non seulement d’honnêtes gens, mais d’habiles politiques qui ont toujours donné à toute la cité des soins vraiment paternels ; pour Théramène, comme la vie politique a été très agitée de son temps, les jugements portés sur lui sont divers. Cependant il semble à ceux qui n’expriment pas une opinion à la légère qu’il ne tentait pas de détruire toutes les formes de gouvernement, comme on l’en accuse faussement, mais qu’il les soutenait toutes tant qu’elles ne faisaient rien contre la loi, en homme convaincu qu’avec toutes on pouvait remplir ses devoirs civiques, ce qui est la conduite d’un bon citoyen, mais sans leur faire de concessions et les combattant au point de se faire détester quand elles agissaient contre la loi.


Les Quatre Cents :
premières mesures.

XXIX. Tant que les chances de la guerre restèrent indécises, les Athéniens conservèrent le régime démocratique. Mais quand, après le désastre de Sicile, les Lacédémoniens l’em-

  1. La diobélie (indemnité pour l’assistance aux fêtes) apparaît en 410 (I. G. I, 188, l. 10 sqq.).