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le particulier, ne suffit pas à donner l’explication complète de la science ; l’universel, sans qui la science n’est rien, vient de l’âme, il est en elle ; la sensation particulière ne fait que l’y réveiller ; elle ne l’y met pas ; il y était peut-être avant cette vie, il y était peut-être dès l’éternité.

En un sens, Kant a résolu la question à peu près comme Platon. Il ne remonte pas, avec les traditions pythagoriciennes et orphiques, jusqu’à la vie antérieure de l’âme, pour expliquer la science qu’elle a dans celle-ci. Il ne dirait même pas allégoriquement avec Ménon, que la science n’est que réminiscence, ne faisant par-là que reculer la difficulté sans la résoudre. Mais il croit tout aussi fermement que Platon, que la sensation ne suffit pas à expliquer la connaissance, et que la partie la plus importante de cette connaissance ne vient pas de la sensibilité. Il distingue admirablement, dans tout acte de l’intelligence, la matière et la forme, la matière qui vient du dehors, la forme qui vient de l’intelligence elle-même. Sans la matière, la forme est vide et n’est qu’une puissance inféconde. Mais la matière sans la forme est une puissance indéterminée, obscure, une sorte de néant inintelligible. Kant a peut-être outrepassé les justes bornes que la raison pouvait ici se prescrire. Dans cette délicate