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Il ne faut donc pas entendre par science rationnelle une science qui aurait fait un divorce complet avec l’expérience. Toute science, quelles que soient à cet égard ses prétentions contraires, part de l’observation et ne peut pas s’appuyer sur une autre base. Kant a beau faire : sa raison pure n’est pas aussi pure qu’il le croit. Il emprunte d’abord à la sensibilité deux éléments indispensables de toute connaissance, de tout concept, le temps et l’espace ; il emprunte aux jugements formulés dans le langage sa liste des Catégories ; il emprunte encore à l’expérience, quoi qu’il en puisse dire, les trois Idées sur lesquelles il essaie de confondre la raison de l’homme, et de lui infliger une salutaire humiliation. D’où peuvent être tirés les mots et leurs rapports, si ce n’est de l’observation ? D’où peuvent être tirées les propositions, si ce n’est de l’observation encore ? Le syllogisme lui-même, est-ce la logique qui le crée ? est-ce l’esprit qui l’imagine ? Non sans doute. Le syllogisme est caché dans tout raisonnement humain. La logique le dégage de tous les éléments accessoires, étrangers, dont ce langage doit le couvrir et le fortifier, pour arriver au but qu’il se propose. Mais la logique ne fait ni le syllogisme, ni la proposition, ni les rapports des mots, dont la proposition est essentiellement composée. Elle