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éprouvent chacune un changement qu’elles sont susceptibles des contraires. Mais la parole et la pensée restent elles-mêmes absolument et toujours immuables ; et c’est seulement parce que l’objet vient à changer qu’elles reçoivent les contraires. Ainsi cette assertion que quelqu’un est assis demeure la même, mais la chose venant à changer l’assertion peut être tour à tour fausse et vraie. Il en est de même pour la pensée. Ainsi donc en ce sens, ce serait une propriété de la substance, spéciale du moins dans la forme, d’être susceptible des contraires par cela seul qu’elle éprouve elle-même un changement. § 24[1]. Tout en admettant encore que la parole, la pensée sont susceptibles des contraires, on peut dire que cette opinion n’est pourtant pas tout à fait exacte. Si l’on dit que la parole et la pensée reçoivent les contraires, ce n’est pas qu’elles reçoivent réellement quelque chose ; mais c’est de fait dans un autre objet que se passe ce changement. C’est uniquement parce que la chose même est ou n’est pas de telle façon, que l’assertion peut être dite vraie ou fausse, et non pas parce que la parole elle-même serait susceptible des contraires. Rien, en effet, ne saurait faire changer ni la parole ni la pensée, en sorte qu’elles ne reçoivent point les contraires, en ce sens qu’aucun changement ne survient en elles. Quant à la substance, c’est parce qu’elle reçoit elle-même les contraires qu’on peut dire qu’elle est susceptible des contraires. En effet, la substance reçoit

  1. Ce paragraphe ne semble être qu’une répétition de celui qui précède. La pensée est identique : et les expressions le sont presque aussi. Les commentateurs ont essayé de trouver entre ces deux paragraphes une différence que je n’y puis voir. La tautologie est évidente, bien qu’elle soit peu explicable.