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nait il y a deux mille ans ; il ne raisonne ni mieux, ni plus mal. L’histoire le prouve : la déduction n’a pas fait un seul progrès ; et, par sa nature, elle n’en peut pas faire. Mais l’on peut dire que l’intuition, au contraire, en a fait d’immenses. Le procédé est bien aussi toujours resté le même ; mais c’est par ce procédé qu’on acquiert des principes nouveaux ; c’est par l’intuition, par l’expérience, que l’intelligence se développe et s’étend ; c’est par elle seule que le genre humain avance. De ces deux opérations de l’esprit, l’une immuable, certaine dans ses résultats, l’autre toujours flottante et indécise, laquelle devait tout d’abord et avant l’autre, tomber sous l’observation de la science ? Celle qui se trouve naturellement le plus en harmonie avec la science elle-même. L’intuition, en quelque sorte, devient perpétuellement ; la déduction est au contraire ; et comme la science s’occupe surtout de ce qui est, c’était de la déduction que d’abord elle devait faire la théorie. Voilà ce qui justifie Aristote contre les reproches qui lui ont été si souvent adressés. Aristote est bien grand, mais enfin il est homme ; et c’est lui demander une chose plus qu’humaine, que de vouloir qu’il ait fait d’un seul coup, à lui seul, les deux grandes parties de la science. C’est bien assez pour sa gloire d’en