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lière de l’intuition qu’il consacre tous ses efforts. Quand à la déduction, il s’en inquiète peu, parce qu’il sait que « contrairement à l’expérience, à l’intuition, cette opération peut ne pas se faire, quand on ne l’apperçoit pas, mais qu’elle n’est jamais mal faite, même par l’esprit le moins accoutumé à raisonner. » « Cette opération, ajoute-t-il encore, n’emprunte pas un grand secours des liens dans lesquels la dialectique embarrasse la raison humaine, en pensant la conduire, encore bien que je sois loin de nier que ces formes ne puissent servir à d’autres usages. »

Cette observation si profonde et si vraie de Descartes, doit nous apprendre pourquoi Aristote s’est borné à la théorie de la déduction, et n’a point poussé jusqu’à celle de l’intuition, de l’expérience, de l’induction bâconienne. De ces deux opérations de l’intelligence, aussi nécessaires l’une que l’autre, aussi évidentes, et qu’Aristote a parfaitement distinguées toutes deux, l’une se présente toujours avec un caractère de certitude, d’infaillibilité, dont les mathématiques donnaient, dès les plus anciens temps, ce magnifique tableau qui ravissait Descartes et Pascal ; l’autre, au contraire, est perpétuellement changeante et variable. L’esprit humain raisonne aujourd’hui précisément comme il raison-