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besoin de s’appuyer sur l’autorité pour comprendre les choses, et qui en apprend plus sur elles par le spectacle du monde bien observé, que les livres ne lui en peuvent enseigner. Il a exprimé plus haut que qui que ce soit ce noble sentiment d’indépendance, ce qui avait bien son prix à une époque où le joug de l’antiquité n’était pas encore tout à fait brisé. Mais c’était là si peu une méthode nouvelle, que Bâcon lui-même a reconnu que l’esprit humain, en suivant cette route, ne faisait qu’imiter les anciens, qui ne nous eussent pas laissé tant de monuments scientifiques, s’ils s’étaient bornés aux observations et aux découvertes de leurs grossiers aïeux. Et pourtant, malgré cette judicieuse appréciation de l’antiquité, Bâcon n’a en général, pour elle, que des insultes et des outrages forcenés. Il n’épargne pas Platon, « ce pointilleux harmonieux, ce poète gonflé, ce théosophe en délire. » Mais Platon du moins trouve grâce, parce qu’il a entrevu l’induction bâconienne, « qu’il a eu le tort, il est vrai, de n’appliquer qu’à des définitions et à des idées. » Pour Aristote, au contraire, qui a fait pourtant la théorie de l’induction, Bâcon n’a pas assez d’injures. « Ce n’est qu’un détestable sophiste, ébloui d’une subtilité vaine, vil jouet des mots, inventeur d’un art de folie, calculant à plaisir