Page:Aristote (trad. Barthélemy-Saint-Hilaire) - Logique, tome 1, Ladrange, 1844.djvu/101

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avaient démontré, presqu’à la fois et par des moyens très-divers, comme on l’a fait bien mieux encore après eux, que la sensation ne pouvait rendre compte de la connaissance, et qu’en ceci du moins Platon avait eu pleine raison, et contre les sophistes de son temps, et contre les tendances de son disciple.

Il est vrai qu’Aristote ne s’est pas laissé emporter aux erreurs qui plus tard sont sorties de ses principes. Mais Platon non plus que Kant n’ont point exagéré leurs propres doctrines. Le mysticisme alexandrin, l’idéalisme de Fichte, n’appartiennent pas plus à Platon et à Kant que le sensualisme n’appartient à l’auteur de l’Organon. Platon, Aristote, Kant, avaient tenté, chose si délicate, de tenir une équitable balance entre l’esprit et la sensibilité. Aristote avait incliné vers celle-ci : Platon et Kant avaient incliné tous deux vers l’esprit. Des disciples sont venus, pour les uns et les autres, accumuler des conséquences que ces sages génies n’avaient pas prévues, et qu’ils auraient certainement désavouées, comme Kant n’a pas manqué de le faire. Mais l’histoire de la philosophie, juste comme elle peut l’être de nos jours, laisse à chacun ses fautes, et tout en montrant le germe de celles qui ont été commises, elle n’en distingue que plus soigneusement ce