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CARION.

Il arrive. Je l’ai laissé environné d’un immense concours de peuple. Ceux qui jusqu’à présent ont eu à peine de quoi vivre, parce qu’ils étaient gens de bien, l’embrassent et le saluent dans l’excès de leur joie. Mais ceux qui possèdent de grandes richesses, que leurs injustices leur ont acquises, froncent le sourcil et font tout à fait grise mine, au lieu que les autres suivent, avec des couronnes sur leurs têtes, en riant et en poussant des cris de joie. La terre retentit sous les pieds de ces bonnes gens qui s’avancent en mesure. Mais allons, que tout le monde de chez nous danse aussi, que chacun saute et qu’il ne se trouve personne qui ne soit de belle humeur, car, désormais, on ne pourra plus nous dire qu’il n’y a point de farine dans le sac.

LA FEMME DE CHRÉMYLE.

Tu as raison ; aussi, par ma foi, je te veux faire une couronne de petits gâteaux pour la bonne nouvelle que tu m’as apportée.

CARION.

Ne tarde donc pas, car voici toute la troupe qui vient.

LA FEMME DE CHRÉMYLE.

Eh bien, je m’en vais donc au logis, d’où j’apporterai de quoi faire les effusions[1] accoutumées sur la tête de celui qui vient de recouvrer la vue.

CARION.

Et moi, je veux aller au-devant d’eux.

  1. On appelait ainsi les noix, les noisettes, les figues, les raisins secs, etc., qu’on versait sur la tête des hôtes et des esclaves quand ils entraient, pour la première fois, dans une maison.