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bouffons et déplacés ; ou qui, loin d’apaiser une sédition ennemie et d’être bienveillant pour ses concitoyens, les excite et les enflamme, en vue de son propre intérêt ; ou qui, placé à la tête d’une cité en proie aux orages, est corrompu par les présents ; ou qui livre soit une forteresse, soit des vaisseaux ; ou qui d’Ægina, comme Thorykiôn, ce misérable percepteur des vingtièmes, envoie à Épidauros des denrées prohibées : des cuirs, du lin, de la poix ; ou qui conseille de prêter de l’argent aux ennemis pour des constructions navales ; ou qui souille d’excréments les images de Hékatè, en mêlant ses chants à la ronde des chœurs ; ou tout orateur qui rogne le salaire des poètes, parce qu’il a été bafoué dans les antiques solennités de Dionysos : à tous ceux-là je dis, je redis, je répète et redis encore pour la troisième fois, de céder la place à nos chœurs mystiques ! Et vous, élevez la voix et chantez nos hymnes nocturnes en usage pour cette fête !

Que chacun maintenant s’avance hardiment dans les retraites fleuries de nos prés, du pied frappant la terre, décochant la raillerie, le mot plaisant, la satire. Assez de festins ! En avant ! Chante de tout cœur, exalte par ta voix Sotéira, qui promet d’assurer à jamais le salut de ce pays, malgré le mauvais vouloir de Thorykiôn. Chantez à présent un autre genre d’hymnes à la Reine des Récoltes, à la divine Dèmètèr ; que vos hommages éclatent en merveilleuses mélodies !

Dèmètèr, souveraine des chastes orgies, sois-nous favorable et protège le chœur qui t’est consacré ; fais que je puisse toujours et sans trouble me livrer aux jeux et à la danse ; me répandre en mots plaisants et en propos sérieux, dignes de ta fête, et, vainqueur en badinage et en raillerie, être couronné de bandelettes !