Page:Aristophane, trad. Talbot, 1897, tome 2.djvu/212

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

LA FEMME HÉRAUT.

Commence d’abord par ceindre cette couronne, avant de parler.

LE CHŒUR.

Silence, tais-toi ; écoutez. La voilà qui crache comme font les orateurs : elle paraît en avoir long à dire.

PREMIÈRE FEMME.

Femmes, ce n’est aucune idée d’ambition, j’en atteste les deux Déesses, qui me fait lever pour prendre la parole ; mais l’indignation que j’éprouve, malheureuse, à nous voir, depuis si longtemps, en butte aux insultes d’Euripidès, ce fils d’une marchande d’herbes, et à ses invectives incessantes et de toute nature. Car quels outrages ne répand-il pas sur nous ? Il nous calomnie partout où se réunissent des spectateurs, des tragédiens et des chœurs, nous appelant adultères, débauchées, biberonnes, traîtresses, bavardes, malsaines, grand fléau des hommes. Aussi nos maris, au sortir des planches du théâtre, nous regardent en dessous, et examinent tout de suite s’il n’y a pas là quelque amant caché. Il ne nous est plus permis de rien faire comme autrefois, tant il a donné de mauvaises idées à nos maris. Ainsi, une femme tresse-t-elle une couronne, on la croit amoureuse. Renverse-t-elle un vase en allant et venant dans la maison, le mari demande aussitôt pour qui elle a brisé la poterie : il est probable que c’est pour l’étranger de Korinthos. Une fille est-elle malade ? son père ne manque pas de dire : « Ce teint-là ne me convient pas pour une fille. » Ce n’est pas tout ; une femme qui n’a pas d’enfants veut en supposer un : elle ne peut pas s’isoler un instant ; les hommes restent là, tout