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Thérèse

Arrivée dans cet aimable ſéjour, je ne fus point étonnée du changement de mon état, parce que mon eſprit n’étoit occupé que du ſoin de vous plaire.

Deux mois s’écoulerent ſans que vous me preſſaſſiez ſur des déſirs que vous cherchiez à faire naître inſenſiblement dans moi. J’allois au-devant de tous vos plaiſirs, excepté de ceux de la jouiſſance dont vous me vantiez les raviſſemens que je ne croyois pas plus vifs que ceux que je goûtois par habitude, & que j’offrois de vous faire partager. Je frémiſſoit au contraire à la vûe du trait dont vous menaciez de me percer. Comment ſeroit-il poſſible, me diſois-je, que quelque choſe de cette longueur, de cette groſſeur, avec une tête auſſi monſtrueuſe, puiſſe être reçu dans un eſpace où je puis à peine introduire le doigt ? D’ailleurs, ſi je deviens mere, je le ſens, j’en mourrai. Ah ! mon cher ami, continuois-je, évitons cet écueil fatal ; laiſſez-moi faire. Je carreſſois, je baiſois ce que vous nommez votre Docteur : je lui donnois