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Thérèse

que vous le voyez aujourd’hui, je vendis le ſuperflus, & dans l’eſpace d’un mois j’arrangeai mes affaires de maniere que je m’aſſûrai trois mille quatre cens livres de rente viagere. Je donnai mille livres aux pauvres, & je partis pour Dijon, dans le deſſein de m’y retirer & d’y paſſer tranquillement le reſte de mes jours.

Chemin faiſant la petite vérole me prit à Auxerre, qui changea tellement mes traits & mon viſage, qu’elle me rendit méconnoiſſable. Cet événement, joint au mauvais ſecours que j’avois reçu pendant ma maladie dans la Province que je m’étois propoſé d’habiter, me fit changer de réſolution. Je compris auſſi, retournant à Paris, & m’éloignant des deux quartiers que j’avois habité pendant mes deux caravannes, je pourrois facilement y vivre tranquille dans un autre, ſans être reconnue. J’y ſuis donc de retour depuis un an. M. B… eſt le ſeul homme qui m’y connoiſſe pour ce que je ſuis : il veut bien que je me diſe ſa niéce, parce que je me fais