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et l’emmène avec M. Catt faire quelques tours sur la terrasse. Ces témoignages de considération ne dissipèrent pas entièrement, cependant, la mauvaise humeur que le premier accueil avait inspirée au marquis.

Il était sujet aux rhumatismes. Un jour qu’il en soufrait beaucoup et qu’il était dans la chambre où l’on attend le roi, ce prince entra et lui dit : « Le temps est beau ; allons nous promener. » Sire, lui dit le marquis, je souffre et ne saurais marcher. Le roi se promena avec M. Catt. Lorsqu’il fut de retour, il causa, comme à l’ordinaire, avec le marquis ; mais lorsqu’il le sut rentré chez lui, il lui envoya un de ses palfreniers avec une étrille, pour lui offrir son petit ministère de la part de sa majesté.

Le lendemain, à dîner, le roi lui dit « Eh bien, marquis, comment vous trouvez-vous ? Je vous ai envoyé hier mes gens pour vous guérir. Sire, répond le marquis piqué, je ne suis ni un cheval ni un mulet ; mais, depuis quelque temps, je m’aperçois que je suis un âne ̃». Le roi sentit bien que le marquis voulait dire qu’il se repentait d’être venu. Il fut piqué, à son tour, de la réponse du marquis, se leva de table, et depuis ce jour