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piner le marquis ; l’autre de jeter du ridicule sur la religion catholique ; il composa un Mandement de monseigneur l’évêque d’aix, contre les impies se disant philosophes ; il en fit parvenir des exemplaires sur la route, de manière que le voyageur put les apercevoir dans les auberges où il se retirait. Le marquis y était désigné de manière à être reconnu et personnellement excommunié. Le mandement avait tous les caractères de ce genre d’écrits ; le ton en était apostolique les citations très chrétiennes, et les discussions plus animées par le zèle que fortifiées par des raisonnemens approfondis. Il y avait donc tout ce qu’il fallait pour que le marquis y fût trompé ; il le fût aussi de la manière la plus complète. Le chagrin qu’il en conçut fut extrême, sur-tout à cause de son frère, premier président du parlement de Provence. Dans sa colère, il ne songeait qu’à se venger : l’imprimé ne sortait pas de ses mains ; à chaque instant il y reportait les yeux ; à la fin, en relisant le titre et le préambule, il vit que le saint pasteur se qualifiait d’évêque, et non pas d’archevêque ; et cette observation fut pour lui un trait de lumière qui lui fit deviner la supercherie. Aussi dès le lendemain fit-il mettre à la poste une