cation turque, par la quantité de mots et de tours de phrases qu’on était obligé d’emprunter de ces langues étrangères, pour donner à la turque plus de force et plus de douceur en même temps. Comment, lui dis-je ! vous mêlez des termes et des expressions de plusieurs idiomes dans vos poésies ? c’est ainsi, me dit-il, que tous les ouvrages qui sont pour les savans, doivent être écrits ; cette langue s’appelle le turc farci ; on ne la parle que dans le sérail et chez les gens de science : l’arabe sert à donner plus de force, le persan plus de tendresse ; et le mélange de ces trois idiomes ne fait qu’un langage plus parfait. Il y a, à la vérité bien des livres qui ne sont écrits que dans un seul idiome tels sont principalement les historiens qui doivent être à la portée de tout le monde ; mais pour les poètes, sur-tout les-bons, ils se servent du turc, de l’arabe et du persan, selon qu’ils jugent qu’il convient à leurs ouvrages.
Je trouvai ce qu’Achmet Chelebi m’avait dit si extraordinaire, que j’en parlai au comte d’Aillon, neveu du marquis de Bonac, qui savait parfaitement le turc ; il me dit la même chose. Le Noir et Fournetis, deux dragomans de l’ambassadeur, me confirmèrent dans cette opinion.