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son établissement, d’une tristesse infinie et d’une santé fort faible ; les médecins lui ont ordonné les eaux de Balaruc, où elle est actuellement.

Ce récit me rendit plus amoureux de Sylvie que je ne l’avais jamais été ; je voulais partir pour aller la voir ; mais il fallait que je me rendisse à Aix, et je me déshonorais, si j’avais fait autrement. Je me contentai de lui écrire et de lui offrir tout ce qui dépendait de moi. Elle me répondit qu’elle était sensible aux marques de tendresse que je lui donnais, mais qu’elle ne voulait de moi d’autre bienfait que la satisfaction de me parler encore une fois. Je l’assurai que, d’abord que mes affaires seraient finies, j’irais lui jurer que je l’aimais plus que jamais.

Je comptais partir lorsque je fus obligé de quitter le régiment de Bourbonnais. Mon frère, qui était officier dans le même régiment, était à Malte, et il arriva dans le temps que j’allais faire ma compagnie ; les autres étaient données, et cette affaire lui eût coûté sa fortune. Il prit ma place ; j’avais toujours eu une envie démesurée d’entrer dans le régiment de Richelieu ; j’avais une estime si parfaite pour le colonel, que je me faisais un plaisir de