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Aix n’était pas la seule ville où régnassent les divisions. La Provence entière était en feu, et le reste du royaume y prenait part. Les molinistes, craignant que leur parti ne fût pas assez fort, firent entrer au parlement un vieux conseiller, qui depuis vingt ans n’y avait mis le pied. Les jansénistes ne restèrent pas court ; ils en firent revenir un de ses terres, où il était depuis quinze années.

Les dames agissaient aussi de leur côté. La marquise de Raymond, qui était brouillée avec un mari qu’elle avait épousé en secondés noces et dont elle n’avait point d’enfans, déshérita sa fille du premier lit en faveur de son époux, avec qui elle se raccommoda, à condition qu’il serait pour la Cadière.

Les jésuites ne donnaient rien ; mais ils promettaient beaucoup et représentaient adroitement leur crédit et combien ils pouvaient être utiles. Jusques alors le parti janséniste n’avait point eu de chef marqué. Le président de Bandol se mit à leur tête ; ce furent quelques-uns de ses amis qui lui firent faire cette sottise ; car étant attaché à la cour par de grands bienfaits, ils le mettaient dans le risque de les perdre. Il n’était pas au nombre des juges ; mais il avait un grand crédit dans