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LIVRE QUATRIÈME.


Le bâtiment sur lequel j’étais était une felouque des plus petites. Nous étions huit ou dix passagers. Les deux premiers jours, nous eûmes beau temps ; pendant la nuit du troisième, comme elle était fort obscure, notre pilote, d’accord avec les matelots s’éloigna excessivement de terre, sans que nous pussions nous en apercevoir. Il était Génois ; et la crainte de rencontrer quelque bâtiment de Corse, l’avait fait éloigner de la côte, cette île s’étant révoltée depuis peu contre la république de Gènes. Nous fûmes fort surpris le matin, lorsque nous nous aperçûmes que nous étions à plus de quinze lieues de terre.

Ce fut bien pis quelque temps après ; le vent ayant fraichi, la mer devint très-grosse ; la tempête augmenta ; nous jetâmes d’abord à la mer toutes les marchandises, pour soulager le bâtiment ; l’orage était si violent, qu’il