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chez M.  Case, professeur de l’académie de peinture, dans l’atelier duquel j’allais travailler à mes heures de loisir[1].

Un jour étant à la comédie, je crus apercevoir le chevalier de Cougoulin que je croyais en Provence : je ne me trompais point, c’était lui-même. Après nous être embrassés, nous résolûmes d’aller souper le soir ensemble : ce repas fut poussé fort loin dans la nuit ; et, le jour nous ayant surpris à table, nous joignîmes le dîner au souper.

L’après midi, comme nous étions assez chauds de vin, je proposai à Cougoulin, en attendant l’heure de l’opéra, d’aller à l’hôtel de Gêvres : je n’avais jamais joué de ma vie ; et, pour la première fois, dans une heure et demie de temps, je gagnai six mille livres à la roulette : j’eus assez de bon sens pour ne pas risquer de reperdre mon argent ; et l’amour que j’avais pour les arts étant alors la seule passion à laquelle je fusse sensible, je partis trois jours après mon gain pour Rome.

Je pris auparavant des lettres de recommandation pour plusieurs personnes, et une entre autres du vicomte de Polignac[2] pour le

  1. Nous avons parlé de M.  Case plus haut.
  2. La maison de Polignac, originaire d’Auvergne,