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cœur et lui dit la proposition que je lui avais faite ; elle l’accepta. J’envoyai le lendemain un habit à la Motille et un à la Belou, pour arrhes de notre marché. Castelane fut congédié, et Bardelin par contre coup. Cette aventure qui fut sue, les exposa à beaucoup de plaisanteries. J’en ai ri depuis bien des fois avec eux.

Mon affaire étant terminée, je me mis en ménage avec la Motille ; je pris possession du domicile. Dans moins de deux mois, si j’avais été prince souverain, j’eusse pu dire que le ciel avait béni mes amours. Motille devint enceinte ; comme je n’avais jamais eu de progéniture, je vis avec plaisir que j’aurais bientôt l’honneur d’être père. Je ne doutais pas que ce ne fût un garçon ; je formais déjà des projets pour lui acheter un bénéfice. L’opéra étant retourné à Marseille, j’y suivis ma maîtresse et m’y établis avec elle. Mon ménage était composé d’elle, de sa mère, d’un laquais que j’avais et d’un Turc que mon frère m’avait donné et qui était esclave sur la galère dont il était officier[1]. C’était lui

  1. Le frère dont parle ici e marquis d’Argens, était Sextius-Luc de Boyer d’Argens, chevalier de Malte, seigneur d’Eguille, de Piedron, officier sur