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dirent qu’il était venu demander d’être musulman, et qu’il fallait qu’il se le fit.

Comme on vit leur opiniâtreté, on dissimula, bien résolu de le ravoir, de quelque manière que ce fût. Le lendemain on retourna à terre sans l’ambassadeur. On avait fait mettre plusieurs gardes marines et officiers dans les chaloupes, et on les avait instruits du dessein qu’on avait. Dès qu’on fut sur le rivage, plusieurs Turcs vinrent, à leur ordinaire, pour acheter des marchandises que nos matelots leur vendaient. Quand il y en eut un certain nombre, celui qui commandait le détachement, donna le signal : on se saisit de cinq ou six Turcs, et on les traîna vers nos chaloupes. Nos soldats, qui étaient sur le rivage, mirent la baïonnette au bout du fusil, pour empêcher qu’on ne les secourut ; il n’en était pas besoin ; les autres prirent la fuite vers les montagnes ; nous ne pûmes en emmener que deux à nos vaisseaux ; les autres, se trouvant plus forts que ceux qui les avaient saisis, s’arrachèrent de leurs mains. Jousoupoff, jeune Moscovite, fâché de ce que celui qu’il avait arrêté l’avait renversé par terre, lui tira un coup de fusil comme il s’enfuyait ; ce coup sembla le signal de trente autres, qui par-