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dant que vous trouviez le secret de venir me joindre. Retournez en France, puisqu’il le faut ; mais revenez le plutôt que vous pourrez ; vous me trouverez toujours fidelle ; je vous le jure par votre amour qui m’est plus cher que la lumière des cieux.

Qu’on est faible, quand on est amoureux ! Cette lettre remit le calme dans mon ame j’en reçus encore plusieurs autres pendant deux jours que je restai à Barcelonne ; enfin je partis avec une escorte de vingt-cinq maîtres[1], qui avait ordre de me remettre entre les mains du gouverneur de la première ville française. En vain je demandai à voir Sylvie avant mon départ. Crivelly me dit qu’il avait des défenses expresses de mon père ; je m’en consolai dans l’espérance que j’avais de la rejoindre bientôt : je la laissais avec de l’argent dans un pays ou elle n’avait rien à craindre de mes parens ; hors la peine que j’avais d’être éloigné d’elle, mon cœur était assez tranquille. Lorsque je fus arrivé à Bellegarde, monsieur le comte de Pertuis m’envoya avec vingt grenadiers jusqu’à Perpignan.

  1. C’est-à-dire de vingt-cinq hommes à cheval, faisant partie d’un corps de cavalerie plus considérable.